Retraites : Le gouvernement fait le choix juste d’un renoncement à l’augmentation de la CSG, mais propose une contribution des entreprises en trompe l’œil, et poursuit l’erreur de l’allongement de la durée de cotisations

Les premières annonces du Premier ministre concernant la réforme des retraites de ce mardi 27 août semblent aller dans le sens de plus d’équité. Mais les entreprises ne seront qu’apparemment mises à contribution et l’allongement de la durée de cotisations n’est pas la bonne solution à la question des retraites.

En choisissant la fiscalisation de la majoration des pensions de 10 % pour les parents de 3 enfants et plus, le gouvernement a fait le choix justifié de faire contribuer les retraités les plus aisés. Les actifs d’aujourd’hui subissent en effet la triple peine : chômage, allongement de la durée de vie au travail, cotisations élevées. Au regard de ces efforts, il est légitime de mieux faire contribuer les retraités au financement d’une future réforme des retraites, mais il était nécessaire que cette contribution ne touche que les retraités les plus aisés. Il aurait été néanmoins préférable que cet effort soit accompagné d’une meilleure prise en charge de la dépendance, qui reste aujourd’hui très insuffisante. Cela fera partie des avancées qui appelleront notre vigilance dans les prochains mois.

Le Premier ministre a également annoncé des mesures de prise en compte de la pénibilité. Celle-ci était en effet la condition sine qua none d’une réforme juste pour les écologistes.

A 60 ans, les hommes cadres ont une espérance de vie de 4,4 ans supérieure aux hommes ouvriers, et les femmes cadres de 2,3 ans par rapport aux ouvrières. Il fallait prendre à bras le corps cette question maintes fois délaissée. Le Premier ministre reprend les conclusions du rapport Moreau sur la mise en place d’un « compte individuel pénibilité », ouvert pour chaque salarié exposé à au moins un facteur de pénibilité (travail de nuit, expositions aux cancérogènes, port de charges lourdes, postures pénibles, bruit …). Le salarié pourra transformer ses points acquis en temps rémunéré pour une reconversion professionnelle, accéder à un travail à temps partiel avec compensation de la baisse de rémunération ou encore racheter des trimestres de cotisation afin de partir plus tôt. Le gouvernement propose une année de départ anticipé pour 10 années d’exposition aux facteurs, mais seulement au-delà de 5 années d’exposition, puisque les 20 premiers trimestres d’exposition ne déclenchent que des droits à formation. Cette restriction est inutile et le salarié exposé pendant 5 ans ou moins à des facteurs de pénibilité doit pouvoir bénéficier également d’un départ anticipé à la retraite ou d’un passage à temps partiel.

En renonçant au relèvement du taux général de la CSG, le gouvernement a fait un choix juste, mais l’effort n’est toujours pas partagé entre entreprises et ménages. La CSG n’est pas une contribution progressive et ne touche que les ménages. Le gouvernement a donc fait le choix juste en préférant une hausse des cotisations. Mais cet effort n’est malheureusement qu’apparemment partagé entre entreprises et ménages puisque le gouvernement a déjà annoncé une baisse des cotisations sociales pour les entreprises supérieure à la hausse envisagée dans la réforme, et ce dès 2014. Pourquoi exonérer encore une fois les entreprises de l’effort collectif ?

Enfin, point noir de la réforme, le gouvernement a fait le choix de proposer un allongement de la durée de cotisations au-delà de 2020. Or, dans une situation de chômage élevé, allonger la durée de cotisations, c’est faire le choix de remplacer la prise en charge des retraités par celle de chômeurs, moins bien indemnisés. L’Unedic a estimé à 30 000 chômeurs et 440 millions annuels, l’impact de la réforme des retraites de 2010. Certes, la situation du chômage est peut être aujourd’hui exceptionnelle, mais nous ne connaissons pas la situation de l’emploi au-delà de 2020.

Allonger la durée de cotisations, c’est aussi et surtout faire le choix d’aller contre le mouvement historique de réduction du temps de travail, et se contraindre à rechercher le retour illusoire d’une croissance forte pour absorber le surcroit de population active (+224 000 en 2012 du fait notamment des précédentes réformes des retraites).

Ce nouvel allongement ne concerne que la période postérieure à 2020, il faut donc absolument se donner la possibilité de réexaminer le bienfondé de cette décision d’ici là, et donc au minimum de conditionner la mise en œuvre de tout nouvel allongement de la durée de cotisations à une étude d’impact sur le chômage.

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