« Arrêtons de mesurer la richesse seulement avec le PIB », JDD
Retrouvez l’interview de votre députée par le Journal du Dimanche (JDD). Ce fut l’occasion pour Eva Sas de revenir sur la genèse de sa proposition de loi visant à intégrer de nouveaux indicateurs de richesse dans les décisions politiques.
« Arrêtons de mesurer la richesse seulement avec le PIB »
INTERVIEW – Les députés écologistes présentent jeudi une proposition de loi pour prendre en compte de nouveaux indicateurs de richesse à côté du Produit intérieur brut (PIB). Eva Sas, auteure du texte, justifie sa démarche.
Faut-il se débarrasser du Produit intérieur brut (PIB)? Depuis des années, il est considéré comme l’indicateur de référence pour déterminer le rang économique d’un pays. C’est ce qui fait que la France a perdu sa place de 5e puissance mondiale face au Royaume-Uni. Les écologistes souhaitent mettre un terme à l’hégémonie de ce critère. Dans le cadre d’une « niche » parlementaire du groupe ce jeudi, les députés présentent une proposition de loi visant à établir de nouveaux indicateurs de richesse, qui viendraient compléter la mesure du PIB. Celle-ci ayant déjà reçu le soutien du gouvernement lors de son passage en commission, elle devrait être adoptée sans difficultés dans l’hémicycle. Pour Eva Sas, auteure de la proposition de loi, il faut trouver « un petit nombre de chiffres qui aient un poids réel ».
Pourquoi vouloir créer de nouveaux indicateurs? Aujourd’hui, seuls deux chiffres sont observés pour évaluer si un pays se porte bien ou non : le PIB et la dette publique. Or, ils ne sont pas représentatifs de l’état de la société dans son ensemble : ils ne prennent pas en compte l’éducation ou les inégalités de revenus, par exemple. Le cas emblématique est celui des Etats-Unis : depuis 2009, le PIB y a augmenté de 12%, alors que le revenu médian des ménages a baissé de 3%. Mais c’est aussi le cas en France : le PIB est resté globalement stable depuis 2012, tandis que la pauvreté a progressé. C’est bien la preuve qu’on ne peut pas se contenter de cette mesure.
Quels devraient être les autres paramètres à prendre en compte? L’idée, c’est de couvrir un vaste champ de thématiques : l’environnement, les inégalités de revenus, la qualité de vie, etc. Il existe déjà beaucoup de données sur ces sujets. En fait, il y en a même tellement que l’on a tendance à s’y perdre. L’enjeu, est donc de passer d’un tableau de bord complet, que personne ne regarde, à un petit nombre de chiffres qui aient un poids réel dans l’évaluation de la réussite d’un gouvernement.
Lesquels? Parmi les données retenues, on pourrait par exemple choisir l’indice de santé sociale, déjà suivi par l’association des régions de France, et qui rassemble derrière ce seul chiffre des variables aussi diverses que l’espérance de vie, l’accès au bac, l’espérance de vie, etc. On pourrait aussi retenir l’empreinte carbone ou les inégalités de revenus.
A quoi serviraient-ils? Il faut remettre du long terme dans la politique. La réussite d’un gouvernement ne serait plus mesurée seulement en fonction de l’impact immédiat des mesures prises, mais dépendrait aussi de l’héritage laissé aux générations futures. De manière plus pragmatique, on pourrait aussi s’en servir pour évaluer l’impact des réformes à venir. Bernard Cazeneuve, du temps où il était ministre du Budget, avait d’ailleurs suggéré de faire un essai « à blanc » cette année. L’idée a depuis été abandonnée, mais nous allons demander de faire une expérimentation dans le budget 2016.