Intervention d’ Eva Sas sur la loi de programmation des finances publiques 2012-2017
Merci Madame la présidente, Monsieur le ministre, M. le rapporteur, chers collègues,
Cette première loi de programmation des finances publiques du quinquennat définit le cadre budgétaire et les axes stratégiques de votre quinquennat.
Nous savons que cette période sera à la fois déterminante pour l’avenir de notre économie et relativement courte pour impulser un changement de modèle de développement.
Si nous partageons votre volonté de réduire l’endettement, nous voudrions souligner, en revanche, les risques inhérents au rythme rapide de réduction des déficits que vous avez adopté.
En effet, ce projet de loi de programmation fixe l’obligation de parvenir à un déficit de 3 % dès 2013 et à un équilibre structurel en 2016. Ce rythme compromet notre capacité à investir dans l’avenir et à impulser les efforts nécessaires à la préparation de l’économie et de l’industrie de demain qui devront être à la fois sobres en énergie et riches en emplois.
Ce rythme semble d’autant plus difficilement tenable que les prévisions de croissance, sur lesquelles il s’appuie, nous semblent, malgré les interventions que j’ai entendues dans cet hémicycle, encore trop optimistes. En effet, la présente programmation repose sur des prévisions de croissance de 0,8 % en 2013 et de 2 % à partir de 2014, alors que, déjà en 2012, selon l’INSEE, le PIB français aura été amputé de 0,8 point par les mesures budgétaires.
Ce rythme, enfin, impose 60 milliards d’économie en 5 ans dont 10 milliards pour financer le crédit d’impôt compétitivité. Avec les 24,4 milliards de hausse de prélèvements obligatoires que vous annoncez pour 2013, c’est donc une modification profonde de la fiscalité qui est mise en œuvre et pourtant, à ce stade, la transition écologique n’est pas au cœur de cette réforme de la fiscalité.
L’annonce de 3 milliards de fiscalité écologique en 2016 est un point positif, et plus encore le comité permanent mis en place par Delphine Batho sur le sujet, mais les enjeux environnementaux auxquels nous devons faire face sont importants. Et nous aimerions qu’ils ne soient pas soulignés que par le groupe écologiste, car c’est le mode de vie, de production et de consommation des générations actuelles et futures qu’il faut faire évoluer pour faire face à l’épuisement des ressources que nous constatons déjà, et cela ne doit pas concerner que notre seul groupe politique. Pourtant, vous prévoyez pour la mission écologie, développement et aménagement durable l’une des plus fortes baisses entre 2012 et 2015 : – 11,5%.
L’écologie aurait du, à notre sens, faire partie des priorités au même titre que celles que vous avez définies et que nous approuvons : la jeunesse, l’emploi, la sécurité et la justice.
En effet, si, pour les années à venir, beaucoup de missions voient leurs dépenses être gelées ou diminuées, les crédits alloués à ces missions prioritaires augmentent et de façon significative. Ces augmentations sont salutaires car ces missions – oh combien importantes ! – ont été trop longtemps délaissés par les gouvernements précédents. Ainsi, les crédits de la jeunesse augmenteront de 14,3 % en trois ans, ceux de la justice de 4,9 % sur la même période, ceux de l’enseignement scolaire de 2,6 %, ceux de la solidarité de 9,6 %. Les crédits dévolus à la sécurité connaîtront une hausse de 3,3 %. Nous aurions souhaité pouvoir ajouter à cette liste la mission écologie.
Enfin, nous nous félicitons de l’abandon de la RGPP. L’évaluation de chacune des politiques publiques sur l’ensemble du quinquennat permettra, en effet, de rendre nos politiques publiques plus efficientes, tout en restant attentif à la preservation du service rendu à nos concitoyens. Evitant, ainsi, le sabrage généralisé, sans évaluation, et aveugle, du quinquennat précédent qui ont mené à la dégradation des services publics que nous connaissons aujourd’hui.
Pour résumer, si nous nous partageons les axes stratégiques de cette loi de programmation, que sont la réduction des déficits et la définition de priorités budgétaires, nous ne pouvons pas ne pas vous faire part de notre inquiétude sur le rythme que vous proposez car nous craignons qu’il ait des conséquences négatives sur l’activité économique. Ce n’est pas qu’un pays seul mène des mesures conjoncturelles de réduction des déficits, comme l’a fait l’Allemagne il y a quelques années, qui pose problème. C’est la conjonction des politiques d’austérité en Europe qui risque de plonger l’ensemble de nos pays dans une crise durable.
Nous vous avions alerté sur ce point lors de débat sur le TSCG. Et nous sommes inquiets de voir que les prévisions de recul du PIB en Allemagne pour le dernier trimestre 2012 et le premier trimestre 2013, en lien avec la baisse des exportations et de la demande européenne, semblent malheureusement confirmer nos inquiétudes.
Enfin, nous espérons que l’écologie retrouvera sa place dans la politique budgétaire et fiscale de la France. La conférence environnementale, le groupe de travail sur la fiscalité écologique, la priorité donnée à la rénovation thermique, ainsi que les déclarations du rapporteur à l’instant, nous paraissent aller dans le bon sens.
Avant de nous quitter, je voudrais, ici, remercier le rapporteur général, le président de la Commission et le ministre du Budget pour leur patience et leur précision dans l’animation de ces débats. Et vous faire part d’un regret et d’un espoir. Un regret, qu’il n’ait pas été possible de prendre plus en compte à ce stade les propositions du groupe écologiste, et d’ailleurs aussi des autres groupes de la majorité, et un espoir, celui que nous puissions travailler ensemble sur les projets de loi de finances suivants. Le ministre du budget parlait à l’instant, de « groupe majoritaire » au singulier, j’aimerais que nous conjuguions ensemble ces mots au pluriel.
Je vous remercie et je voudrais à mon tour vous souhaiter de joyeuses fetes de fin d’année.