Vous trouverez ci dessous la vidéo et le texte de l’intervention d’Eva Sas lors de l’examen du projet de loi de finance rectificatif (PLFR) du 23 juin 2014.
Merci Monsieur le président,
Messieurs les ministres, Madame la rapporteure, chers collègues,
Nous abordons à cette heure, l’examen du premier texte budgétaire depuis les élections municipales puis européennes. Vous comprendrez donc qu’il ne s’agit pas d’un simple projet de loi de finances rectificatif, mais aussi de la réponse que nous devons apporter au message que nous ont adressé les français.
Or nous constatons que ce collectif maintient les deux axes sur lesquelles repose invariablement la politique budgétaire depuis le début de la mandature : la réduction des déficits et les allègements inconditionnels accordés aux entreprises sans contreparties.
Nous notons bien qu’une inflexion a eu lieu, et elle va dans le bon sens, avec les mesures en faveur des ménages aux revenus modestes, notamment les allègements d’impôt sur le revenu jusqu’à 1,1 fois SMIC, les allègements de cotisations sociales salariales pour les salariés jusqu’à 1,3 fois le SMIC, et les mesures en faveur des artisans.
Mais ce n’est pas d’une inflexion dont nous avons besoin, mais d’une véritable réorientation. De plus en plus de voix se font entendre, au sein de la majorité, pour estimer qu’un rééquilibrage est nécessaire. Un rééquilibrage entre économies et investissements, et un rééquilibrage entre ménages et entreprises. Car, si l’on prend l’ensemble des mesures fiscales, le déséquilibre reste flagrant, puisque les ménages recevront 2 milliards en 2015, alors que les entreprises recevront, elles, 23 milliards !
C’est une question de justice, mais c’est aussi une question d’efficacité.
Dans ce débat qui s’engage, les écologistes veulent être force de propositions. Car notre objectif est, d’abord, de contribuer à une plus grande efficacité de nos politiques publiques. Efficacité en matière d’emplois. Et efficacité en matière d’environnement.
C’est pourquoi nous vous ferons des propositions d’amendements autour de trois axes
– La conditionnalité des aides aux entreprises, et en particulier du crédit d’impôt compétitivité emploi et du crédit d’impôt recherche
– L’aide directe à l’emploi, avec les emplois d’avenir et les contrats d’apprentissage
– Et le soutien à la transition écologique pour faire émerger un nouveau modèle de développement porteur d’emplois et protecteur de l’environnement, ce qui suppose en premier lieu de maintenir le budget de l’écologie
Car si l’emploi est notre priorité partagée, nous pouvons diverger sur les solutions à adopter. Car comme le Haut Conseil des Finances Publiques le soulignait déjà le 22 avril dernier, il nous semble qu’il existe, je cite, « un risque que les effets positifs sur l’emploi et les salaires de la politique d’offre n’atténuent pas les effets négatifs sur l’activité de la consolidation budgétaire ». D’où l’importance d’une politique d’aides aux entreprises mieux ciblée, d’un soutien direct à l’emploi comme la relance des emplois aidés et de l’apprentissage que proposent certains de nos collègues et que nous soutiendrons, et de mesures en faveur du revenu des ménages dont une part croissante se retrouve aujourd’hui dans la plus grande difficulté.
Notre priorité, c’est aussi, vous le savez bien entendu, l’environnement. Et je ne peux passer ici sous silence deux mesures que portera ce projet de loi de finances rectificatif et qui sont lourdes de sens pour nous, écologistes.
La baisse de 288 millions d’euros du budget de l’écologie, dont 220 sont transférés au budget de la Défense.
Et la taxe poids lourds, devenue péage de transit, dont le réseau taxable est réduit de plus de deux tiers et le rendement de moitié. Nous avons appris que cette révision serait introduite par amendement dans le projet de loi de finances rectificatif. Je voudrais souligner ici que les écologistes ne peuvent pas comprendre que l’on abandonne ici à la fois les objectifs environnementaux et financiers de cette taxe poids lourds. Est-il devenu secondaire de diminuer le trafic des poids lourds sur nos routes ? Comment allons nous financer demain nos transports collectifs puisque c’est plus de 500 millions de manque à gagner qui résultent de cette décision ? Est-ce que ce seront les ménages qui paieront à la place des poids lourds ? Pourquoi ne pas vous être appuyés sur l’excellent travail de la mission parlementaire de Jean-Paul Chanteguet qui avait proposé des aménagements tels que l’exonération des premiers kilomètres, aménagements qui auraient permis de conserver l’ambition de la taxe tout en prenant en compte les intérêts de tous ?
Vous comprendrez, M. le ministre, que ces deux éléments nous font douter de l’ambition du gouvernement en matière d’écologie. Nos familles, nos enfants, ont besoin d’un environnement sain et d’une planète vivable pour grandir en toute sérénité. Nous ne pouvons plus continuer à favoriser le développement d’un modèle économique polluant et consommateur de ressources. Les écologistes ne peuvent renoncer à cette conviction, et espèrent encore vous la faire partager.
Alors depuis plusieurs jours maintenant, la question nous est posée sans cesse de savoir si nous voterons ce projet de loi rectificatif et si nous nous inscrivons de ce fait dans la majorité. J’ai envie aujourd’hui M. le Ministre de vous retourner la question : Souhaitez vous travailler avec les écologistes et d’autres députés sur les amendements que nous proposons ? Souhaitez-vous maintenir l’ambition de la France en matière d’écologie, notamment en maintenant le budget que vous lui consacrez ? Souhaitez-vous en définitive vraiment que les écologistes fassent partie de la majorité ?
Je vous remercie.